Pas un pas sans Bata

J’avais huit ans et j'habitais à Lovanium, un campus proche de Kinshasa.
A l’époque, nous vivions les débuts de la société de consommation.
On trouvait partout en ville des panneaux publicitaires avec le slogan « Pas un pas sans Bata ».
L’objet de convoitise de toutes les petites filles était un nouveau modèle de sabots en plastique verni que la marque de chaussures déclinait en plusieurs couleurs.

Je venais de recevoir la veille la paire de sabots que j’avais attendue pendant des semaines et que je portais fièrement.
Ce matin-là, mon père nous a embarqués, mon petit frère, mon amie et moi, dans sa 4L pour rejoindre un club sportif en ville.
Sur la route, il n’a pas réussi à éviter un véhicule qui s’est encastré dans notre voiture.

Nous étions en pleine cité et il n’était pas rare qu’on assiste à des lynchages en cas d’accident.
Mais les blessés étaient dans notre voiture et des inconnus nous ont transportés à l’hôpital.

Souffrant d’une sérieuse commotion cérébrale et de côtes cassées, mon père est resté pendant deux semaines couché dans l’obscurité.
Mon frère, assis à l’avant, a arboré depuis cet accident un deuxième sourire et mon amie n’a eu qu’une égratignure sur la jambe.
Quant à moi, j’ai mis des jours à m’en remettre. 
Je n’ai jamais retrouvé un des deux sabots.

Changement de temps

changement de temps
hier turquoise l'eau vire
au gris des ardoises
sitôt couché sur le sable
il faut déjà repartir

Raz de marée

silence
la nuit elle épie le souffle
du nouveau-né

spasme du sanglot
désormais les nuits
sans sommeil

baby blues
on ne nait pas maman
on le devient

raz de marée
le cœur pris en otage
par deux grands yeux bleus

vingt-quatre et trente-trois ans
finalement toujours
mes petits

perpétuité
que l'on prend quand
on devient maman

Un jour spécial

Le jour est spécial et nous sommes presque tous là. 
Depuis une ou deux semaines, j’appréhende ce moment.
J’ai beaucoup réfléchi et fait le tri. 
Ce discours, je l’ai fait cent fois, cherchant certains mots, en supprimant d’autres.
Dès les premiers secondes, ma gorge se noue mais relevant la tête, je vois quelques regards m’encourager à poursuivre.
Déjà perlent quelques larmes.

discours de départ
comment lui dire
qu'elle va me manquer

L’Art d’écrire des haïkus

Un grande joie de voir un de mes haïku repris dans le dernier recueil de Danièle Duteil , "L'Art d'écrire des haïkus". 
Merci Danièle.

réveil en douceur
le petit voisin 
fait ses gammes

Editions Eyrolles